Envie d'une enquête mais sans violence ? Envie d'exotisme ? Envie de lire en sirotant un thé ? Ce roman est pour vous !

Chat et mânes à Quito

Cosy mystery

Chat et mânes à Quito

Un cosy mystery drôle et dépaysant, entre enquête policière légère, chat mystérieux, chamane équatorienne et secrets de famille au cœur de Quito.

Un chat mystérieux. Une chamane têtue. Trois meurtres trop bien cachés.

À Quito, au cœur des Andes, Yolanda, chamane au franc-parler, mène une vie rythmée par ses rituels, ses plantes médicinales… et les petits drames de ses clientes. Mais quand une voisine affolée lui jure que l’esprit de sa mère défunte est venu la visiter, Yolanda n’a pas le temps de lever les yeux au ciel : un ancien voisin débarque aussitôt à sa porte avec une requête encore plus troublante.

Ce qui ne devait être qu’une histoire de visions étranges se transforme vite en enquête bien réelle. Trois meurtres, deux familles, des rancunes bien ancrées… le puzzle s’annonce compliqué à assembler !
Heureusement, Yolanda n’est pas seule. Un chat noir sorti de nulle part s’invite dans son quotidien, l’embarquant sur des pistes improbables. Ce félin entêté a un flair redoutable pour se faufiler là où il ne devrait pas être. Mais Yolanda devra apprendre à interpréter ses mystérieuses apparitions… et à ne pas perdre patience devant ses caprices de matou…un peu spécial !
Entre humour, exotisme et surnaturel, cette enquête mène le lecteur dans les ruelles colorées de Quito, entre traditions chamaniques et secrets de famille bien gardés. Car dans ce cosy mystery au goût de spiritisme et de thé vert, même les esprits refusent de rester tranquilles.

Un cosy mystery pétillant et original qui ravira les amateurs d’énigmes légères, de félins malicieux et de mystères délicieusement surnaturels.

ISBN : 979-8267687317

Nombre de pages : 256 pages

Date de sortie : 29 septembre 2025

Disponible dans les abonnements Kindle

Lire un extrait - Chapitre 1 :Un chat squatteur

Quito, capitale de ce pays des Andes qu'est l'Équateur, compte 3 millions d'habitants. Parmi eux, des descendants des Aztèques, Mayas et Espagnols, aux tons de peau aussi variés que magnifiques, mais tirant sur le brun chocolat pour les véritables indigènes. Le Quiteño possède l'étrange habitude – étrange pour un citadin – d'acheter des chiens. Beaucoup de chiens. On estime à deux millions le nombre de chiens dans la ville. Et ceci sans compter les chiens errants. C'est pourquoi je regarde ce chat noir qui se tient sur ma terrasse avec stupéfaction. Comme partout dans la ville, les jardins sont entourés de murs, puis rehaussés par des grilles électriques de 15'000 volts. Sécurité oblige, malheureusement. Mes voisins immédiats ont trois chiens d'un côté et quatre de l'autre, ce qui donne lieu à de nombreux concerts cacophoniques diurnes et nocturnes. Ce chat est donc passé au travers de sept chiens pour arriver dans mon petit jardin. Fallait-il qu’il eût envie de venir me voir ! Il me regarde, je le regarde, puis je tente d’établir le contact.

Je m'appelle Yolanda et je suis chamane. Je communique avec les esprits pour aider les gens à soigner leurs problèmes, principalement à nettoyer les schémas familiaux. J'ai cinquante-trois ans, je vis seule, et un chat noir me regarde.

— Comment as-tu fait pour passer sans te faire manger ou électrocuter ? Es-tu aveugle ou loco[1] ?

Le chat ne daigne pas me répondre. Ne croyez pas que j'affabule, j'entends quand les animaux me parlent. Mais par contre, je n'ai jamais su si c'était eux qui le faisaient directement ou si c'était un esprit qui venait en soupirant me traduire en espagnol ce qu'ils racontaient. Amusée, je le regarde entrer sans se faire prier. Il s’assied, se lèche une patte et plisse ses yeux jaunes. Je hausse les épaules et je retourne à mes légumes. Mon bouillon de légumes et mon filet de porc ne vont pas se cuisiner tout seuls. Je hache, coupe et émince les légumes, je les plonge dans l’eau froide et soudainement je réalise que mon filet a disparu de la table. Je secoue la tête en me traitant de tonta[2] et je rouvre le frigo. Rien. Je me retourne, les yeux fixés sur la table qui trône au beau milieu de ma cuisine. Elle est en bois massif - chose rare dans notre pays - et me sert de plan de travail et de table à manger, mais pas de bureau. Je ne fais pas mes consultations dans cette pièce, car la protéger et la « nettoyer » des mauvaises énergies après chaque séance me demanderait trop de travail. Toujours à la recherche de mon filet, je soulève les épluchures, poireaux et pelures d'oignon quand je vois le chat assis sur une chaise. Il est en train de mâchouiller avidement le filet, tandis que des morceaux déchiquetés tombent à ses pieds.

— Voleur ! Mon filet !

Le chat relève la tête, mâche, avale et miaule un coup. Ça veut dire « désolé » ou « ‘y en a pas encore ? ». Une chose est sûre, c'est que contrairement aux chiens, il ne montre aucun remords. Rien à fiche, le matou !

— Pccht !

Je tente de le chasser en brassant l'air devant lui, mais il ne bouge pas.

— Viens !

Je cligne des yeux et je ne bouge plus. A-t-il bien dit "viens" ?

— Pardon ? demandé-je bêtement.

Il ne dit plus rien, mais se redresse, s'étire et me montre ses fesses. Il se dandine vers la terrasse. Mue par mon intuition, je le suis, oubliant aussitôt mon bouillon de légumes. J’ai appris il y a bien longtemps à ne pas laisser mon mental me diriger. Quand je sens quelque chose, je le fais. Et aujourd’hui, je file le train à un chat.

Celui-ci saute sur mon mur, passe sous le premier fil électrique en se courbant gracieusement. Ah, c’est donc ainsi qu’il a pénétré dans mon jardin ! Il renifle et regarde quelque chose dans la rue.

— Tu ne t’attends quand même pas à ce que je fasse la même chose ?

Il faut croire que oui, car il saute et disparaît de ma vue. Il me semble entendre à nouveau un « viens ! ». En soupirant, je retourne rapidement dans ma cuisine, j’éteins le gaz sous ma casserole d’eau, puis je me dirige vers l’interphone. J’appuie sur le bouton qui ouvre la porte du jardin. Une fois dans la rue, je me tourne et retourne : plus de chat en vue.

Por Dios, il va me faire tourner en bourrique, ce matou !

Je m’apprête à rouvrir la porte du jardin quand je vois la queue du chat dépasser du coin de la rue, mais elle disparaît aussitôt derrière le mur. Pestant contre moi-même, je marche dans cette direction. Cela peut paraître stupide, mais cela ne l’est pas, je vous assure. Après tout, je travaille avec des esprits depuis plus de trente ans et je suis habituée à recevoir des messages de la façon la plus anodine à la plus étrange. Un panneau de publicité dans la rue qui me donne un mot clé, en rapport avec un client ou alors de temps à autre une phrase, entendue dans le bus ou dans une émission de télé. Des voix, parfois, qui résonnent dans ma tête. Les moyens sont aussi variés que fascinants. Il suffit d’être à l’écoute. Pour être honnête, il arrive parfois que je ne les voie pas ou alors que je les interprète mal. Les esprits fonctionnent comme les rêves (sans doute, y a-t-il quelque chose à comprendre ?), car les messages n’arrivent jamais au destinataire sans être passés par des filtres divers, que ce soit par l’inconscient, dans le cas des rêves, ou par le mental dans le cas des signes. Dans les deux cas, notre cerveau les interprète à sa façon et il n’est pas toujours simple de discerner ce qui est censé nous être communiqué d’un faux indice.

Toujours est-il que je suis docilement le chat qui a la gentillesse de se retourner de temps à autre pour vérifier que je suis bien derrière lui. Je ne sais pas pourquoi, mais je trouve cela un tantinet vexant. On remonte l’avenue Rio Coca pour finalement tourner dans une ruelle. Machinalement, je lis la plaque verte vissée conte un mur : Calle Atahualpa.

Le quartier ressemble au mien : de petites maisons d’un ou deux étages et petits édifices abritant des appartements, tous ceints d’un jardin au rez-de-chaussée, quand il n’y a pas de locaux commerciaux dans ce même édifice. Chaque propriété est entourée de murs en pierre recouverts de peinture blanche, la plupart du temps cloquée par les ultra-violets violents de nos 2800 mètres d’altitude. Vous ne venez pas à Quito pour bronzer, c’est une certitude. Premièrement, c’est une habitude qui n’existe pas dans mon pays, car il est considéré comme « pauvre » d’avoir la peau foncée, celle-ci étant le signe d’une ascendance indigène, mal vue par les descendants des colons espagnols à la peau plus claire. Nous avons de réelles classes sociales dans le pays et l’ouvrier formé sur le tas et les domestiques en constituent la plus basse. Sans aucune formation, ces métiers sont ceux des pauvres et ils gagnent le salaire minimum imposé, soit environ 400 dollars américains. Ils vivent en général en dehors de la ville, car les loyers de cette grande ville sont inabordables pour un pauvre travailleur. La deuxième raison pour laquelle personne ne songe à demeurer au soleil plus de quelques minutes est qu’entre le fait d’être à l’équateur et le fait d’être à 2800 mètres, l’astre jaune tape à la verticale si on peut dire et tout brûle sous ses rayons : peinture, peau et yeux ! On est très loin du soleil méditerranéen que j’ai eu la chance de voir un jour, lors d’un séjour au sud-ouest de la France. On pourrait véritablement se demander si c’est bien le même !

Le chat disparaît sous une grille de garage. Je m’arrête devant, et comme nous ne possédons pas de boîte aux lettres, aucun nom n’est jamais indiqué sur le devant des propriétés ou à l’entrée des immeubles. Sécurité égal anonymat dans mon pays. Je vois un mur peint en orange, surmonté d’une grille électrique comme la mienne. Il m’est impossible de voir autre chose, car tout est fait pour que l’on voie le moins possible depuis la rue. Cependant, le toit dépasse à peine du haut mur… je penche pour une maisonnette individuelle. Que faire ? J’appelle le chat ?

Gatito ?

— Miaou.

Il est bien là, mais qu’espère-t-il ? Que je vais sonner ? Pour demander quoi ? De toute façon, personne ne me laissera entrer.

— Sois plus clair la prochaine fois ! Pour l’heure, je m’en vais !

J’attends une réponse, mais rien ne vient. J’ai dû halluciner en croyant entendre qu’il me disait « viens ! ». Je prends le chemin du retour en grommelant. Le soleil tape sec aujourd’hui et j’arrive essoufflée et en nage chez moi. La fraîcheur de ma cuisine me paraît le sommet du bonheur. Je rallume ma plaque et termine mon bouillon de légumes. Sans porc. L’aventure du jour m’aura coûté un filet.

— Quel voleur, ce chat ! Je l’enverrais bien m’en racheter un ! Mais comme il n’a pas de porte-monnaie, il ne peut pas, c’est bien pratique !

Quelques heures plus tard, en début d’après-midi, il pleut à verse, ce qui est un phénomène tout à fait standard à Quito. Dans la capitale, neuf à dix mois par année sont considérés comme pluvieux. De plus, on a l’habitude de dire que les quatre saisons se passent en une seule journée, ici. Les volcans qui entourent les Andes, et qui culminent à presque 5000 mètres fracassent allègrement tout imprudent nuage qui se permettrait de venir nous faire coucou. Entre l’humidité des maisons et les ultra-violets, on pourrait se demander ce qu’avaient en tête les Kitu-Kara, peuplade indigène qui est venue s’installer à ces hauteurs et qui a créé Quito. Personne ne le sait exactement, sauf ceux qui voient les choses différemment. Pour ma part, je sais que Quito représente une sorte de troisième œil de la colonne vertébrale qu’est la chaîne des Andes. Un haut lieu énergétique pour celui ou celle qui sait comment aborder (et donc utiliser) ce type de forces. Le peuple indigène savait très bien ce qu’il faisait, c’est une évidence. Ce qui est également certain, c’est que nous avons quasiment perdu ou oublié ce savoir, au profit d’une modernité qui ne sied pas vraiment à nos coutumes.

Mon bouillon de légumes avalé – avec un œuf dur – je m’installe devant mon vieil ordinateur portable. J’ai beau être chamane et travailler avec les esprits, je ne puis ignorer ces satanés réseaux sociaux. Bien qu’ils soient énergivores et chronophages, je dois reconnaître que c’est un excellent moyen pour demeurer en contact avec ma famille en Europe. J’ai une sœur qui vit à Toulouse et un oncle qui vit à Milan. Cela fait longtemps que je ne les ai pas vus autrement que par vidéo, mais le voyage est tellement coûteux pour un salaire équatorien que je ne sais pas quand j’y retournerai. Ce que je gagne avec mes consultations me permet tout juste de manger et de payer mon loyer. Je n’ai pas d’assurance santé et je ne paie pas d’impôts, donc mes dépenses sont réduites, mais notre pouvoir d’achat est faible… très faible.

Je regarde ce que mes contacts ont mis en ligne, réponds à quelques amis puis j’éteins. Il est temps de me préparer pour ma prochaine consultation. J’attends une cliente régulière qui aime aller fouiller dans les méandres des membres de sa famille, qu’ils soient morts ou vivants, afin de « nettoyer les mémoires de ses ancêtres », dit-elle. En vérité, c’est une adorable vieille dame qui aime passer du temps hors de chez elle et qui aime par-dessus tout m’entendre lui communiquer ce que lui disent les esprits. Les nettoyages énergétiques de ses ancêtres sont terminés depuis longtemps. J’ai beau lui le dire, j’ai beau lui répéter que nos séances ne sont plus nécessaires, elle s’en moque. Elle continue à venir dès qu’elle réussit à mettre 20 dollars de côté. Mes tarifs habituels sont un peu plus élevés, mais je lui fais une ristourne pour sa fidélité… et pour ma propre éthique. Je creuse et cherche à chaque fois quelque chose à nettoyer ou élucider, mais je dois avouer que je peine de plus en plus. De ce fait, ces séances me coûtent cher en énergie pour ne pas me donner à penser que je l’escroque.

La sonnerie de l’interphone retentit. Je décroche le combiné.

Si ? Buenos días ?

Soy Carmita, mi querida[3].

C’est elle. J’appuie sur la touche d’ouverture et raccroche le combiné. Elle est étrangement ponctuelle pour une Équatorienne. Je dis étrangement, car dans mon pays, un rendez-vous demeure approximatif, voire même négligeable. La notion de l’heure est une chose qui n’est pas évidente et il est fréquent d’attendre en vain son client, sans qu’il s’excuse d’une quelconque manière. Par ailleurs, tous les docteurs, dentistes et autres praticiens demandent à leur secrétaire d’appeler les clients le jour avant le rendez-vous afin de confirmer celui-ci. C’est une façon de s’assurer que le client en question n’oubliera pas. Malheureusement cela ne suffit pas toujours. J’en sais quelque chose.


[1] Fou.

[2] Idiote.

[3] C’est Carmita, ma chérie.